L'INFAILLIBILITÉ ET SON OBJET

L'Église peut engager son infaillibilité à propos de vérités contenues dans la Parole de Dieu écrite ou transmise par la Tradition, telle est la doctrine catholique. Mais l'Église peut-elle se prononcer de façon infaillible, sans aucun risque d'erreur, avec toute l'autorité qu'elle a reçue du Christ et en engageant l'avenir de façon irrévocable, sur des vérités non révélées ? Si oui, lesquelles ? Quel est alors l'assentiment requis par le magistère de la part des fidèles ? Ces questions ont été remises à l'ordre du jour par un certain nombre de documents magistériels romains (comme la Profession de foi de 1989, ou le Motu proprio « Ad tuendam fidem » de 1998). L'interprétation de ces documents ne va pas de soi : il y est question de « vérités que l'Église propose de façon définitive concernant la doctrine sur la foi et les moeurs ». Cela veut-il dire qu'elle engage alors son infaillibilité ? Et quelles sont ces « vérités » ? Quant à l'assentiment exigé, qualifié de « définitif », il semble d'ordre élevé, mais n'est pas déterminé précisément. Ces questions se sont posées aux interprètes de la Lettre « Ordinatio Sacerdotalis » (1994), par laquelle le pape Jean-Paul II a déclaré que l'ordination sacerdotale était réservée aux hommes. Ce livre présente un dossier théologique où les documents magistériels les plus récents, confrontés aux textes des deux conciles du Vatican, sont replacés dans leur contexte historique. Seul celui-ci permet d'évaluer leur poids réel et de mesurer l'ampleur des questions soulevées. On perçoit l'enjeu de fond abordé dans ce travail : le statut, dans l'Église, de l'autorité doctrinale, notamment infaillible. Statut qu'il importe d'apprécier avec rigueur, pour mieux le fonder : il y va de la crédibilité de la parole de l'Église, dans une société où, même pour les croyants, une parole délivrée avec autorité ne va pas toujours de soi.