Revue internationale de psychanalyse
Il existe aujourd’hui une constellation de manières de faire famille : monoparentale, recomposée, homoparentale, adoptive, en co-parentalité sans couple amoureux, choisie entre amis... Mais en quoi ces nouvelles formes familiales témoignent-elles de quelque chose de vraiment nouveau, dans la perspective de l’expérience analytique ? Dès la fin des années 1960, alors que la mondialisation et la libéralisation des mœurs charriaient leur lot d’espérances, Lacan mettait en garde son auditoire en pointant l’échec des utopies communautaires qui prétendaient remplacer la famille. Le mode de jouissance de chaque sujet a un caractère de singularité indissoluble dans le lien social et en premier lieu dans le lien familial, qui en est une forme bien particulière. C’est ce qui cause le malaise dans la famille qui, lui, n’a rien d’inédit : ce qui est nouveau, c’est la forme que prend ce malaise quand dominent des idéaux égalitaristes et individualistes qui effacent l’incarnation du désir. Qu’est-ce qui, dans la famille – qu’elle se rêve néo ou qu’elle se veuille tradi –, pourrait soutenir la séparation des jouissances confuses ? La famille s’illustre par un certain éclatement, voire par un rejet, mais elle n’a pas fini de jeter ses éclats, dans la mesure où la fonction de transmission qu’elle soutient a un caractère irréductible, constituant pour le sujet. Ce numéro montre combien la logification qu’a opérée Lacan sur la famille œdipienne, avec les concepts de fonction paternelle et maternelle, d’objet a et de symptôme, de savoir et de jouissance, de nomination ou encore de lalangue, permet de saisir la manière dont cette transmission opère, ou pas, au cas par cas, dans les familles.