Un autre Dreyfus alsacien ?
Karl Roos (1878-1940), leader emblématique de l’autonomisme alsacien de l’entre-deux-guerres, est arrêté pour espionnage en 1939. Après un procès à huis clos, dont le verdict était établi d’avance, un tribunal militaire le condamna à mort. Il est fusillé le 7 février 1940.Que cet intellectuel éminent, respecté de tous, élu de surcroît et chef politique parmi les plus exposés d’Alsace, ait pu être utilisé par les Allemands pour des opérations d’espionnage militaire est invraisemblable. D’ailleurs, la preuve de la culpabilité de Karl Roos n’a jamais pu être apportée. L’historien Lothar Kettenacker évoque un « crime judiciaire ». Les nazis vont ensuite récupérer et instrumentaliser sa mort en le présentant comme un héros allemand.Curieusement, le dossier de la procédure militaire a disparu des archives, et avec lui, les pièces pouvant servir à établir son innocence. Exécré par les nationalistes français et sacrifié à une absurde raison d’État, la thèse de sa culpabilité continue à s’imposer comme un dogme dans la mémoire collective, sans interpeller nombre d’historiens : coupable parce que fusillé ! Et la présomption d’innocence ?Au prétexte d’avoir livré des secrets aux Allemands, le capitaine Alfred Dreyfus, également d’origine alsacienne, a lui aussi été condamné à huis clos par un tribunal militaire, alors qu’il était pourtant parfaitement innocent.