Pascal demeure l'un des esprits les plus insaisissables de notre tradition. Prodige précoce, inventeur de génie et polémiste redoutable, il traverse son siècle en ombre, discret jusqu'à l'énigme. Mort à trente-neuf ans, il n'aura presque rien publié de son vivant. De cette oeuvre foisonnante, ce sont pourtant les Pensées — simples fragments épars, chantier inachevé — qui ont conquis la postérité. Irréductible à tout système, cette écriture de l'intime déroute autant qu'elle fascine. Pensée en clair-obscur, elle oscille entre misère et grandeur, entre rigueur scientifique et fulgurance religieuse, entre lucidité implacable sur nos fragilités et intuition d'une vérité qui nous dépasse. Philosophe du paradoxe, Pascal oblige à tenir ensemble ce qui semble s'exclure. Il déjoue nos catégories, nous entraîne dans un labyrinthe où chaque certitude vacille — sous l'égide d'un Dieu lui-même caché, qui se dérobe au moment même où il se révèle. Félix Martinez est professeur de philosophie en lycée, à Saint-Malo