La première hypothèse de ce colloque repose sur l'intuition selon laquelle la jurisprudence du Conseil d'État relative au droit constitutionnel, de près ou de loin, est un peu un angle mort de la doctrine , qu'elle soit administrativiste ou constitutionnaliste. Tout semble indiquer notamment que les constitutionnalistes auraient plutôt tendance à sous-estimer ce qu'il y a de constitutionnel dans la jurisprudence du Conseil d'État pour comprendre la Ve République. Enfin, la seconde hypothèse est l'idée selon laquelle le Conseil d'État ferait du droit constitutionnel de façon spécifique ou particulière – c'est-à-dire qui n'a rien à voir avec la façon habituelle –, qu'ont les constitutionnalistes de faire du droit constitutionnel ou même de le comprendre. Il s'agit surtout de réfléchir à la manière dont le Conseil d'État use de la constitution et du droit constitutionnel. Le Conseil d'État aurait une compréhension du droit constitutionnel qui lui serait spécifique, c'est-à-dire celle de légistes . Par là même une telle institution, en raison de son histoire et de sa culture administrative, serait en réalité peu soucieuse de respecter les canons et l'idéal du constitutionnalisme supposé être pourtant le fondement du droit constitutionnel moderne. Il serait intéressant, ajoutait-on aussi, de rechercher dans quelle mesure sous la Ve République, l'œuvre multiforme du Conseil d'État, en sa qualité d'interprète de la constitution n'a pas contribué à accentuer la présidentialisation du régime constitutionnel de la Ve République. Ces deux hypothèses présupposent toutefois de se demander ce que signifie en vérité " faire du droit constitutionnel ". On laissera aux lecteurs le soin de découvrir quelles ont été les réponses apportées à ces questions par les auteurs des contributions ici rassemblées.